Homélie du Père Bruno Bibollet prononcée lors de la messe d'A Dieu à l'église de Brignais, le 18 avril 2015.
Quand nous nous sommes retrouvés, sœurs et frères de Claude et leurs conjoints, pour préparer cette cérémonie, l'évangile du Lavement des pieds s'est imposé à nous. Le CHRIST serviteur de tous sans exception, le CHRIST qui prend la dernière place pour servir, c'est bien cette manière d'être du CHRIST qui a marqué Claude dès son séminaire au Prado de Limonest. En étudiant l'évangile à la manière du Père Chevrier, il a découvert un CHRIST attentif à tous, toujours disponible, toujours prévenant pour ceux qui souffrent ou sont exclus. Il a laissé l'Esprit mettre ses pas dans ceux de Jésus CHRIST.
Je veux donner quatre flashs sur la vie de Claude.
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J'ai admiré comment dans la première paroisse dont il a été le Curé à St Alban, il a su, malgré sa charge de curé, se rendre présent aux familles des victimes à l'Institut Médico-légal. Il était débordé, mais il disait : « On ne peut pas laisser les familles seules en un moment pareil ». Il se faisait présent le temps qu'il fallait. Tant pis si, le soir, il tombait d'inanition sur son lit pour se réveiller, le lendemain, tout habillé... Il se déshabillait pour prendre son bain, bien sûr !
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Claude aimait les gens. C'est pour mieux les connaître que pendant toute une période de sa vie, il a tenu à travailler professionnellement à mi-temps. Il voulait être présent à tous, proche de tous, en dehors de toute étiquette même religieuse. Il anticipait l'appel du pape François qui nous écrit dans sa lettre "La joie de l'Évangile" : « Nous sommes tous appelés à accueillir cette invitation : sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l'Évangile ».
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À Givors et à Vaulx-en-Velin surtout, il a pris la mesure des différents groupes nationaux, ethniques et religieux de tous les immigrés qui habitent nos banlieues. Avec le Père Bernard Turull, ils ont imaginé des célébrations de la Nuit de Noël et de la Veillée pascale dans l'immense salle de Charlie Chaplin à Vaulx-en-Velin. Ils ont eu l'art d’organiser des célébrations pluriculturelles dans lesquelles chaque communauté pouvait exprimer sa foi suivant sa culture. Claude avait le génie de trouver une place à chaque groupe dans le déroulement de la liturgie. Le cardinal Balland a présidé une de ces veillées pascales ; à la fin de la célébration, Claude lui a demandé : « Que pensez-vous de cette cérémonie ? » Le cardinal de lui répondre : « C'était très bien ; tout y était mais dans un ordre différent ! » Le maire de Vaulx-en-Velin ne disait-il pas : « Il n'y a que le curé pour faire vivre ensemble toutes ces communautés si disparates ! » Je rêve de voir le Père Bernard Turull écrire ce que fut cette
expérience de brassage culturel sous le ciel étoilé de Noël et dans l'aube de la Résurrection. L'Église d'aujourd'hui en a GRAND BESOIN. Un ami de Meyzieu auquel j'annonçais le décès de Claude et qui assurait une permanence au Centre Jean XXIII m'a dit : « J'admirais comment Claude accompagnait royalement jusqu'à la porte du Centre, les petites gens qui venaient le trouver. Ils en sortaient grandis. » Avant de donner mon quatrième flash - un petit souvenir personnel. Lorsque nous étions séminaristes à Limonest, nous allions les fins de semaine en paroisse à St Germain aux Monts d'Or aider le vieux Père Martin ; nous y allions en vélo. Comme je passais devant l'atelier de mécanique, je vois Claude en train de régler son dérailleur. Je lui dis : « T'es toujours en train de bichonner ta bicyclette, ça doit la détraquer. Je m'occupe pas de la mienne et j'ai jamais d'ennuis ! Eh bien, mon salaud, me répondit-il, qui est-ce qui graisse ta chaîne, change les patins de tes freins, ajuste le
dérailleur ? » J'avais perdu une bonne occasion de me taire...
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Mon dernier flash : Claude était un actif. Il avait besoin de faire pour exister. L'épreuve de la maladie lui a montré qu'il pouvait exister sans rien faire. Il a su être une Présence au sein de la Résidence Louise Thérèse. Vendredi 10 avril, en le laissant, je suis resté à contempler sa tête posée sur l'oreiller ; ses yeux brillaient de toute la tendresse de son cœur ; son sourire occupait tout son visage... J'ai vu, à ce moment, la Face du Ressuscité.
AMEN
Père Bruno Bibollet.
Le Père Bruno Bibollet est un ami de jeunesse de Claude Reure. Ils ont été ordonnés ensemble, sur les marches du chœur de l'église de Brignais.
Après des années au Brésil, auprès de Dom Helder Camara, le Père Bibollet est devenu aumônier du monastère de Pradines.